Accéder au contenu principal

Articles

Affichage des articles du mai, 2014

Et si l'on partageait notre quotidien ?

T rottoirs humides, ciel sale, fausse pluie, vents contraires, frissons. Le joli mois de mai, comme on le connaît bien, à Paris. Il y a Roland-Garros, tous les jours, à la télé. Comme quand j'avais 17 ans, et que je révisais le bac. Ça n'a pas changé. Cette atmosphère, ces habitudes, cette ville, ces passants… tout ça, c'est mon quotidien . Depuis des années. Vingt jours pour se connaître Ce que je ressens, ce que je perçois, ce que je vis, beaucoup autour de moi le connaissent bien. Être à Paris, prendre les transports, travailler, sortir dans ces bars, dans ces cafés… j'aime prendre conscience de ça. Et mesurer aussi que d'autres individus, à l'autre bout du monde, ont un autre quotidien. D'autres habitudes, d'autres ressentis, d'autres modes de vie. Des chercheurs du MIT ont créé une application qui permet à deux personnes de se connecter pendant 20 jours, l'une à l'autre. Le nom du projet est simple : 20 days Stranger . D

J'aime l'araignée

J 'aime l'araignée et j'aime l'ortie, Parce qu'on les hait ;  Et que rien n'exauce et que tout châtie Leur morne souhait ; Parce qu'elles sont maudites, chétives, Noirs êtres rampants ; Parce qu'elles sont les tristes captives De leur guet-apens ; Parce qu'elles sont prises dans leur œuvre ; Ô sort ! fatals nœuds ! Parce que l'ortie est une couleuvre, L'araignée un gueux ; Parce qu'elles ont l'ombre des abîmes, Parce qu'on les fuit, Parce qu'elles sont toutes deux victimes De la sombre nuit… Passants, faites grâce à la plante obscure, Au pauvre animal. Plaignez la laideur, plaignez la piqûre, Oh ! Plaignez le mal ! Il n'est rien qui n'ait sa mélancolie ; Tout veut un baiser. Dans leur fauve horreur, pour peu qu'on oublie De les écraser, Pour peu qu'on leur jette un œil moins superbe, Tout bas, loin du jour, La vilaine bête et la mauvaise herbe

À l'origine de nos ennuis

" L a plupart de nos ennuis sont notre création originale", écrit Paul Valéry dans Tel Quel . Comme souvent chez cet auteur, les mots trouvent un sens immédiat à notre esprit. Ils correspondent à une réalité indéniable . On se fait soi-même du mauvais sang, bien souvent. On se fait du mouron.  Cela ne signifie pas que la volonté, seule, suffit à terrasser n'importe quel démon intérieur ; ni que l'on peut se défaire de tous ses soucis, délibérément. Il faut simplement avoir conscience que l'on se crée, parfois, ses propres obstacles à surmonter. Vis-à-vis du passé, et des regrets que l'on se façonne au fil du temps, il y a une autre phrase de Valéry qu'il faut lire, et lire encore. Elle est la clé pour effacer tous les remords :  "Ce que l'on regrette de la vie, c'est ce qu'elle n'a pas donné - et jamais n'aurait donné. Apaise-toi".  Concernant l'avenir, les projets, les ambitions, et tout le vertige qu

À cœur joie

L 'odeur de la pluie. La certitude que le beau temps reviendra bientôt. Les amis bronzés, déjà, avec qui l'on prend un verre en terrasse, le soir venu. Les nouvelles personnes que l'on rencontre, après avoir discuté sur Twitter, et dont on découvre des chapitres entiers de vie. Comme si ça n'avait rien d'incongru, finalement. Comme s'il était tout à fait naturel de passer de la conversation en ligne à la discussion bien réelle, physique, vécue.  Car c'est le sens de l'histoire .  La beauté du printemps. À la campagne, la forêt renaît miraculeusement ; en ville, c'est le sourire sur le visage des passants qui fait sa réapparition soudaine. Les gens sont heureux de marcher dans la rue, de sortir sans pardessus. C'est la saison où les arbres s'habillent de feuilles, et où les humains se dévêtissent. Les deux mouvements sont concomitants.  C'est maintenant, surtout, qu'il faut s'en donner à cœur joie. Maintenant qu'

L'aube, l'ombre, le soir, l'espace et les étoiles

L 'aube, l'ombre, le soir, l'espace et les étoiles ;  Ce que la nuit recèle ou montre entre ses voiles, Se mêle à la ferveur de notre être exalté. Ceux qui vivent d'amour vivent d'éternité. Il n'importe que leur raison adhère ou raille Et leur tende, debout, sur ses hautes murailles, Au long des quais et des havres ses flambeaux clairs ;  Eux, sont les voyageurs d'au-delà de la mer. Ils regardent le jour luire de plage en plage, Très loin, plus loin que l'océan et ses flots noirs ;  La fixe certitude et le tremblant espoir Pour leurs regards ardents ont le même visage. Heureux et clairs, ils croient, avec avidité ;  Leur âme est la profonde et soudaine clarté Dont ils brûlent le front des plus hautains problèmes ;  Et pour savoir le monde, ils ne scrutent qu'eux-mêmes. Ils vont, par des chemins lointains, choisis par eux, Vivant des vérités que renferment leurs yeux Simples et nus, profonds et doux comme

Sortir du troupeau ?

C e besoin que l'on a de se différencier en permanence, de se distinguer, de se construire une identité propre. Personne ne souhaite a priori ardemment ressembler à ses prochains. Personne ne veut se conformer à ce que pensent ou disent les autres. Le paradoxe de notre époque Être juste "normal" surprend, désormais. Que l'adjectif soit utilisé (stratégiquement) par un candidat à la présidentielle ou qu'il soit récupéré par les post-hipsters qui en font un concept absurde (le "normcore"), il devient un sujet d'étonnement. Les magazines en font leur couverture. J'écoute Miossec. Sa voix grave résonne dans mes écouteurs. “ Je ne retournerai pas au bureau. Je dois rassembler toutes les miettes, enlever les poignards dans le dos. Faudrait un peu qu'on arrête, je ne suis pas qu'un drôle d'oiseau. (…) Je veux juste sortir du troupeau ”.  L'envie est partagée par beaucoup de monde. Je suis le premier, sur ce blog

Éloge du message privé sur les réseaux sociaux

O n pourrait s'étonner que, sur la plupart des réseaux sociaux, et notamment sur des applications comme Instagram, on retrouve quasi-systématiquement la possibilité d'envoyer des messages privés à une personne en particulier. Du "message inbox" sur Facebook au "direct message" de Twitter, en passant par WhatsApp, les plateformes sociales accordent une place non négligeable aux conversations en coulisse, d'individu à individu. One to one Comme si ces correspondances singulières, plus intimes, plus secrètes, plus douces parfois, demeuraient au cœur des conversations humaines. Comme si nous ne pouvions nous passer de ces confidences sur l'oreiller. De ces chuchotements derrière le rideau. J'ai écrit mon premier mémoire (en M1) sur " le Off en politique ", c'est-à-dire sur ces échanges discrets entre personnalités publiques et journalistes, au cœur de tous les traitements médiatiques, de tous les sujets possibles et i

Le positivisme

I l s'ouvre par-delà toute science humaine Un vide dont la foi fut prompte à s'emparer. De cet abîme obscur elle a fait son domaine ; En s'y précipitant elle a cru l'éclairer. Eh bien ! nous t'expulsons de tes divins royaumes, Dominatrice ardente, et l'instant est venu Tu ne vas plus savoir où loger tes fantômes ; Nous fermons l'Inconnu. Mais ton triomphateur expiera ta défaite. L'homme déjà se trouble, et, vainqueur éperdu, Il se sent ruiné par sa propre conquête En te dépossédant nous avons tout perdu. Nous restons sans espoir, sans recours, sans asile, Tandis qu'obstinément le Désir qu'on exile Revient errer autour du gouffre défendu. Louise Ackermann

Savez-vous ce qu'est un kakemphaton ?

C ultivons-nous un peu, si vous le voulez bien. Nous passons nos journées à nous stalker  les uns les autres, à regarder des photos, à suivre l'actualité, à tel point que nous finissons par oublier d'apprendre. C'est important, pourtant, d'apprendre . Savez-vous, par exemple, ce qu'est un kakemphaton ? Je présume que non, en m'excusant par avance auprès de mes lecteurs les plus érudits, qui pouffent et s'exclament en eux-mêmes : "bien sûr, qui donc ignore ce qu'un kakemphaton est ?" avant de délaisser ce blog pour se replonger dans la Critique de la Raison Pratique.  Maladresse littéraire Le kakemphaton est une figure de style. Ce nom vient du grec " kakos " ("mauvais, laid") et " emphaton " ("parole"). Elle désigne "la rencontre de sons d'où résulte - involontairement - un énoncé ridicule, déplaisant, ou - volontairement - tendancieux".  En gros, c'est lorsque de g

À découvert

I l paraît que je ne m'exprime plus comme avant, sur Internet. Que je m'engage moins, à découvert. Que je ne m'expose plus vraiment, que je ne prends plus de risque. Comme si je restais sur mes gardes, comme si je préservais ma vie personnelle, comme si je craignais un jugement. C'est ce qu'une amie m'a fait remarquer. Elle avait l'impression que j'avais changé, par rapport aux premières années de ma présence sociale.  Mes premiers billets de blogs, mes premiers tweets, mes premiers statuts Facebook, étaient peut-être plus transparents sur celui que je suis . Je me souviens qu'en effet, ça en surprenait certains, qui m'invitaient à plus de prudence, à l'époque, à plus d'anonymat. Les temps changent, et j'ai peut-être intégré ces conseils. Ou alors, c'est l'âge. C'est moi qui change. Je suis moins insouciant, même ici, chez moi . Je n'ai pas la même tranquillité lorsqu'il s'agit de mettre à nu mon état d&

Un corps nu attire toujours les vues

Ç a fait le buzz. Quoi qu'on en dise, ça marche toujours. La recette semble intemporelle, inépuisable. Une femme, nue, en vidéo. Un prétexte bidon. Un titre accrocheur. Et vous dépassez le million de vues sur Youtube dans la semaine, quand ce n'est pas dans la journée. Le dernier exemple en date est pour le moins révélateur : " elle se balade cul nul dans la rue " a déjà attiré plus de 4 millions d'internautes. La vidéo, faite - ô surprise ! - par des étudiants en publicité, est pourtant inintéressante au possible : une nana en culotte se promène dans les rues de Lille. Ses jambes sont peintes pour faire croire qu'elle a un pantalon. C'est nul, mais ça fonctionne. Allez savoir pourquoi. Nu et non avenu C'est assez paradoxal, quand on y pense. Alors que tout le monde peut, en trois secondes, accéder à des centaines de milliers de vidéos pornographiques, gratuitement ; alors qu'on est bombardé, dans notre quotidien, de publicités où la

Dans mon lit le repos désiré

T out aussitôt que je commence à prendre Dans le mol lit le repos désiré, Mon triste esprit, hors de moi retiré, S'en va vers toi incontinent se rendre. Lors m'est avis que dedans mon sein tendre Je tiens le bien où j'ai tant aspiré, Et pour lequel j'ai si haut soupiré Que de sanglots ai souvent cuidé fendre Ô doux sommeil, ô nuit à moi heureuse ! Plaisant repos, plein de tranquillité, Continuez toutes les nuits mon songe ; Et si jamais ma pauvre âme amoureuse Ne doit avoir de bien en vérité, Faites au moins qu'elle en ait en mensonge. Louise Labé

Danser en silence, avec ses contemporains

J 'étais, mercredi soir, en Allemagne. La veille du premier mai, donc. Or, en Allemagne, la veille du premier mai, c'est ce qu'on appelle le "Tanz In Den Mai" : on danse pour célébrer le mois de mai. Il y a une ambiance festive, dans la rue, dans les immeubles, tout au long de la nuit. Je suis sorti pour danser, moi aussi. Une façon de partager une coutume locale, en bon Européen que je suis. D'autant que l'on célèbre depuis longtemps, partout, en Europe, " la nuit de la Walpurgis ". Silent Party Je me suis retrouvé dans un hangar à la devanture délabrée - et décorée par les street-artists régionaux - pour une soirée silencieuse ( "Silent Party" ). Le concept est simple : c'est comme une boite de nuit, mais où chacun a sur les oreilles un casque qui diffuse deux pistes musicales (au choix). Et tout le monde danse, et chante, et fait la fête. Mais si vous enlevez votre casque une seconde, c'est silencieux, et vous avez

Le Selfie, c'est bien. Le Style, c'est mieux.

D ans une chronique relativement bien écrite, publiée dans le très sérieux New-York Times , l'acteur James Franco défendait il y a peu "le sens des Selfies". Pour ceux qui l'ignorent encore, James est l'une des célébrités qui publient le plus de selfies - ces autoportraits du bout du bras. Il est-même surnommé “ Le Roi des Selfies ” par certains, et son compte Instagram offre, de facto , la possibilité de le voir sous toutes les coutures. Hello, this is me. James Franco concluait sa chronique par ces mots : " I am actually turned off when I look at an account and don’t see any selfies, because I want to know whom I’m dealing with . In our age of social networking, the selfie is the new way to look someone right in the eye and say, “Hello, this is me". Le selfie serait donc la meilleure façon de savoir, dès le premier contact, "à qui l'on s'adresse" . Une sorte de préambule nécessaire, à l'heure des réseaux s