Ça fait le buzz. Quoi qu'on en dise, ça marche toujours. La recette semble intemporelle, inépuisable. Une femme, nue, en vidéo. Un prétexte bidon. Un titre accrocheur. Et vous dépassez le million de vues sur Youtube dans la semaine, quand ce n'est pas dans la journée. Le dernier exemple en date est pour le moins révélateur : "elle se balade cul nul dans la rue" a déjà attiré plus de 4 millions d'internautes.
La vidéo, faite - ô surprise ! - par des étudiants en publicité, est pourtant inintéressante au possible : une nana en culotte se promène dans les rues de Lille. Ses jambes sont peintes pour faire croire qu'elle a un pantalon. C'est nul, mais ça fonctionne. Allez savoir pourquoi.
Nu et non avenu
C'est assez paradoxal, quand on y pense. Alors que tout le monde peut, en trois secondes, accéder à des centaines de milliers de vidéos pornographiques, gratuitement ; alors qu'on est bombardé, dans notre quotidien, de publicités où la nudité équivoque s'imprime en permanence dans nos rétines ; alors que, en 2004 déjà, 80 % des garçons de 14 à 18 ans et 45 % des filles du même âge déclaraient avoir vu au moins une fois un film X au cours de l'année écoulée ; le "nu" conserve son pouvoir mystérieux.
Pourquoi l'anatomie passionne-t-elle autant, quand on peut voir ce que l'on veut en quelques clics ? Pourquoi demeure-t-on curieux, alors que rien n'est caché, véritablement ? Pourquoi les internautes continuent-ils de regarder ces vidéos, alors que tout est offert à celui qui cherche un minimum ?
Que les hommes (et les femmes) des années cinquante aient pu être tout émoustillés en se passant sous le manteau des photos érotiques, je peux le comprendre. Mais aujourd'hui… comment expliquer de tels phénomènes, alors que c'est si simple, si immédiat, si omniprésent ?
Obsédés, vous aussi vous cédez
Le pire, c'est que ça nous concerne tous. Vous, en premier lieu, mes chers lecteurs. Non, ne niez pas, je vois désormais clair dans votre jeu. Le jour où j'ai publié sur Twitter le message suivant, le trafic sur mon blog a explosé. Comme jamais auparavant. Une augmentation de près de 300 %. Peu de retweets, mais énormément de clics.
Pour voir Julie Gayet nue, dans un bain, c’est ici. http://t.co/7bK2YQ1sfo (et dire que c’était sur mon blog depuis 2010…).
— Basile Segalen (@basiloo) January 24, 2014
Mais je vous comprends, et je ne vous jette pas la pierre, Pierre.
Simplement, il faut se rendre à l'évidence : ça ne sert à rien de se creuser les méninges pour capter l'attention des internautes, à court terme tout du moins. Il suffit d'un titre accrocheur. D'une caméra. Et d'une exhibitionniste.
De la confiture à des cochons
Les publicitaires l'ont compris depuis longtemps. Des études démontrent l'influence de la nudité dans la captation de l'attention du consommateur. Et apparemment, en dépit du bon sens, ce phénomène n'est pas prêt de disparaître.
Si vous venez de lire ceci, je vous demande néanmoins de faire un effort. Collectivement, nous pouvons améliorer un peu ce monde : la prochaine fois, ne cliquez pas sur le lien vers vidéo de la femme nue qui prend le métro à une heure de pointe. Ni sur le lien vers la photo de la star nue qui s'est retrouvée sur le net. Exigez autre chose. Refusez de consommer ces contenus de mauvaise qualité. Demandez un peu de confiture, de préférence. Même si vous êtes des cochons, dans le fond.
Bien vu comme toujours Basile ! A bientôt pour un déj ? Charlotte (@Chlesage)
RépondreSupprimerAvec plaisir, Charlotte. :) Et merci !
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