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Articles

Affichage des articles du septembre, 2011

Un triste beau jour de septembre

“ A h, que ce dernier jour de septembre est donc beau !” proclame Roxane dans le dernier Acte de Cyrano de Bergerac . Elle ne sait pas encore que celui-ci va mourir, dans quelques minutes, et devant elle qui plus est, en lui avouant tout, après tant d'années. Au moment où elle prononce cette phrase, elle est tout à fait sereine, appréciant ce jour de beau temps, et cet automne qui commence tout juste, avec les premières feuilles des arbres qui se mettent doucement à tomber. Ce que Cyrano commente si bien d'ailleurs : “ Comme elles tombent bien ! Dans ce trajet si court de la branche à la terre, Comme elles savent mettre une beauté dernière, Et malgré leur terreur de pourrir sur le sol, Veulent que cette chute ait la grâce d'un vol ! ” Je pense que je me replongerai toute ma vie dans l'œuvre d'Edmond Rostand, tant celle-ci contient de pépites. C'est ce que j'aime dans la littérature : lire une seule phrase peut vous faire changer de regar

Le temps de la crise perpétuelle

C ’était il y a trois ans. Tout le monde évoquait la crise économique, la plus importante depuis ce jeudi noir de 1929 qui nous semblait pourtant si loin. On découvrait d’un seul coup ce qu’étaient les subprimes , on suivait ce séisme financier et on demeurait incrédule, sans savoir très bien à quoi s’attendre désormais. La “ grande crise économique ”, jusque là recouverte de la poussière de l’Histoire, redevenait présente, imminente, et toute aussi violente – à en croire les avis des spécialistes et autres commentateurs. Toutes les rédactions journalistiques se mettaient à réviser leurs connaissances économiques, tant bien que mal d’ailleurs. L’enjeu était de taille : il fallait être à la hauteur – autant que possible – de l’attente des lecteurs/téléspectateurs qui cherchaient à comprendre quelque chose à tout ça.  Toute crise a pour caractéristique de faire couler de l’encre. État critique permanent Ce qui était particulier, c’est qu’on pensait savoir ce qu’était une crise. Étant

Le coche et la mouche

D ans un chemin montant, sablonneux, malaisé, Et de tous les côtés au Soleil exposé, Six forts chevaux tiraient un Coche. Femmes, Moine, vieillards, tout était descendu. L'attelage suait, soufflait, était rendu. Une mouche survient, et des chevaux s'approche ; Prétend les animer par son bourdonnement ; Pique l'un, pique l'autre, et pense à tout moment Qu'elle fait aller la machine, S'assied sur le timon, sur le nez du Cocher ; Aussitôt que le char chemine, Et qu'elle voit les gens marcher, Elle s'en attribue uniquement la gloire ; Va, vient, fait l'empressée ; il semble que ce soit Un Sergent de bataille allant en chaque endroit Faire avancer ses gens, et hâter la victoire. La mouche en ce commun besoin Se plaint qu'elle agit seule, et qu'elle a tout le soin ; Qu'aucun n'aide aux chevaux à se tirer d'affaire. Le Moine disait son Bréviaire ; Il prenait bien son temps ! Une femme chantait ; C'était bien de chansons qu'alo

De retour vers Paris

Je suis dans le train, qui file à travers la campagne française. La nuit commence à tomber : bientôt je verrai mon reflet en regardant par la fenêtre. Pour le moment, je vois encore une chaîne de basses montagnes, au loin, et des champs, séparés par des haies, des lacs, et quelques chemins de terre.  Le soleil perce encore les nuages, mais sa lumière faiblit déjà. Il faudra que je termine avant l’arrivée ce livre d’Hemingway - Le Jardin d’Eden -, assez mauvais si je le compare aux deux précédents que j’ai dévoré ces dernières semaines. C’est rassurant, en un sens, de voir que les plus grands romanciers peuvent se planter, de temps à autres. Eux-aussi . J’ai froid aux pieds ; la clim n’est pas très bien réglée, probablement. La plupart des passagers dorment déjà, et ne se rendent pas compte du souffle de fraîcheur qui balaye leurs jambes. Je m’arrête un instant d’écrire, pour regarder ce fleuve que nous traversons : le Rhône. Je reste un long moment absorbé par les paysages, plongé d

Trompettes de la renommée

Dix ans après

11 septembre 2011. Il pleut sur Paris. Il y a dix ans, jour pour jour, je m'en souviens, le ciel était magnifique, au petit matin. Le soleil étincelait. Ce genre de journée où rien ne semble pouvoir arriver ; où tout est suspendu. Quand il fait beau, on imagine mal le pire . On a tort, sur ce point. Le pire se soucie assez peu des conditions météorologiques. Dix ans déjà. C'était un mardi. C'est aujourd'hui un dimanche. Je revenais d'une journée de cours au Lycée Lavoisier, assez calme à vrai dire, pour retrouver ma mère, devant la télévision, en plein après-midi. Ça m'avait d'emblée surpris. Et puis je l'avais vu pleurer. Je crois que je ne savais même pas ce qu'était le World Trade Center à l'époque. J'étais allé à New-York pourtant, quelques années plus tôt, mais je n'avais pas retenu le nom de toutes ces tours dressées vers le ciel. En quelques minutes, j'apprenais leur existence, pour de bon, et elles disparaissaient aussitôt en