Accéder au contenu principal

Pourquoi les secrets n'ont pas leur place online.


Dans une société où chacun gère son image, protège son e-réputation, soigne son profil Facebook, tout en se montrant de plus en plus utilisateur des médias sociaux, on peut considérer que tout ce qui n'est pas visible en ligne demeure secret.

Le secret, à l'origine, du moins étymologiquement, signifie “ce qui est à part, séparé de”. Aujourd'hui, il faut comprendre cela littéralement. Le secret de chacun est ce qui reste isolé, caché, a fortiori ce qui reste offline. Il faudrait être fou ou très imprudent pour se livrer pleinement à un confident aussi peu scrupuleux que l'est Facebook, ou Google.

C'est la raison pour laquelle j'écrivais, il y a plusieurs années déjà, que ma vie ne serait jamais en ligne. Mon for intérieur n'est pas numérique, il est bien réel, physique, à l'abri des regards et de la NSA.

Il n'y a peut-être rien qui ennoblit plus un être humain que de savoir garder un secret”. Sören Kierkegaard

À l'heure de l'information continue, du temps réel, de Twitter, des médias perpétuels, il n'est pas aisé de garder quoi que ce soit secret, sur le long terme. Cela devient vite pesant, usant, et des témoignages récents en attestent clairement. Pour s'en sortir, on peut décider de rompre le secret.


Ou de le garder pour soi, malgré tout, avec ce que ça comporte de difficultés.

Mais je m'interroge : est-ce que tous les gens que je vois quotidiennement sur les plateformes sociales ont des secrets ? Combien gardent pour eux ces histoires tues, ces confidences qui se font silencieuses, ces aveux qui refusent de s'exprimer ? Quels sont les secrets de ces personnes qui sont “mes ami(e)s” sur Facebook, et que j'ignore encore ?

Le rêve de Facebook

Facebook, justement. Le rêve de ce réseau est de connaître, un jour, vos secrets. Il vous pose la question tous les jours, insidieusement : “what's on your mind?”. C'est bien cela qui l'intéresse. Il l'exprime clairement en affirmant fièrement (ici) qu'il sait deviner précisément quand vous tombez amoureux.

Mais Facebook n'est pas le seul.

Une nouvelle application mobile, justement baptisée "Secret", se propose de vous libérez de vos secrets, anonymement. Vous n'avez pas besoin de vous créer un compte, à proprement parler. Vous vous exprimez simplement, tranquillement, et vous êtes notifié sur votre téléphone quand quelqu'un “like” ou commente votre publication.


Confidences sur l'oreiller

Toutes les applications de partage éphémère s'inscrivent en un sens dans la même logique. Si c'est éphémère, c'est déjà un début. Le secret ne se propagera pas de façon trop vulgaire, trop explicite. Les contenus intimes - quels qu'ils soient - ne seront pas étalés à la vue de tout le monde.

Mais je crois, au fond, que les vrais secrets sont ceux qui demeureront loin de ces sphères technologiques-là. Ils resteront ces mots murmurés de personne à personne, sur l'oreiller, un soir d'hiver. Ces chuchotements éternels, confiés à une personne de confiance.


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Derrière les mots et les images des médias sociaux

J amais il n'y avait eu de si longues périodes de silence sur mon blog. Aucun post depuis février. Je crois que j'avais besoin de prendre un peu de recul. De m'interroger aussi sur ma présence en ligne. Allez savoir si c'est l'âge - le mien, d'ailleurs, ou celui d'Internet - ou autre chose encore : mais on finit par se poser des questions sur ces mots qu'on donne à lire. C'est sans doute à force de consulter les plateformes sociales. Toutes ces images, ces vidéos, ces sourires affichés, qu'on voit quotidiennement. En sachant aussi ce qu'ils cachent. C'est notre époque : nous possédons des outils de plus en plus performants pour communiquer, mais ce que nous communiquons est souvent loin de ce qui nous anime véritablement. Souvent loin de ce que nous sommes. En résulte sans doute parfois un certain mal-être, qui est compensé par ces mêmes outils numériques nous offrant des solutions de méditation ou des cures de sommeil. C'est la montr

Puisqu'il faut vivre avec

J e ne sais même pas par où il faudrait commencer. Ce n'est finalement pas simple d'écrire face à une situation inédite, imprévisible, surprenante, historique. J'ai plutôt l'habitude de décrire ici de petits aspects du quotidien, de partager des réflexions personnelles, sans grande prétention. Soudain, le monde s'écroule. Tenir un blog en pleine crise sanitaire mondiale apparaît quelque peu illusoire.  J'écrivais pourtant, sur ce même blog, il y a plusieurs années maintenant, ce sentiment de vivre depuis ma naissance le temps des crises perpétuelles . J'entendais parler depuis toujours - du moins était-ce mon sentiment - de crise. Crise de l'éducation nationale, crise du travail, crise identitaire, crise de l'hôpital, crise écologique bien sûr, crise migratoire, crise économique, j'en passe et des meilleurs. La crise était devenue la norme. Et c'est de nouveau le cas, il me semble. Nous vivons l'époque d'une crise continue.

Ni pour, ni contre, bien au contraire

C ela fait un moment qu'aucun mot n'a été écrit sur ce blog. Les années passent. Je perds cette - bonne - habitude. Plus globalement, je partage moins mes pensées, mes envies, mes doutes sur les médias sociaux. J'ai un peu du mal à me positionner dans les débats quotidiens, un peu du mal à entrer dans l'arène des polémiques diverses, des controverses incessantes. Je n'ai plus envie ni d'être pour, ni d'être contre. Je ne réclame ni la démission d'untel, ni ne m'emballe pour le respect de la présomption d'innocence.  Je rêve de nuance, de précision, d'intelligence, de juste mesure. Je rêve de discussions, de conversations, où l'on prend autant de l'autre qu'on ne contribue soi-même à faire avancer une juste cause. Les duels exacerbés, systématiques, m'usent peu à peu. J'imagine que je ne suis pas le seul dans cette situation, à contempler sans mot dire les violentes échauffourées des plateformes sociales. Le temps de la jou