Il serait sans doute impossible - serait-ce seulement souhaitable ? - de vivre en se consacrant toujours à l'essentiel. Ne rien entreprendre qui ne réponde à un motif profond, fondamental. S'efforcer sans cesse de faire du bien, agir selon des principes réfléchis et honnêtes, abandonner toute vanité et tout désir superflu.
On prend un risque à se montrer sincère. Si je confiais aux gens que j'aime mes sentiments à leur égard, si j'insistais pour leur dire à quel point ils sont importants à mes yeux, à quel point j'aimerais passer plus de temps à leurs côtés, je pense qu'ils s'inquiéteraient ; ils me supposeraient un mal inconnu, fatal. Basile, tu es sûr que ça va ? Il est inhabituel de s'entendre dire que l'on compte aux yeux de quelqu'un.
J'ai parfois l'envie d'écrire vingt messages, sur Facebook, aux vingt personnes qui comptent le plus pour moi. Raconter quelques souvenirs précieux, à jamais inscrits dans ma mémoire, des souvenirs qui m'ont fait, tel que je suis. Des souvenirs qui alimentent encore mes rêves, certaines nuits. Pourtant, je pense que je serais moi-même surpris, et suspicieux, si je recevais dans mon inbox un message soudain, plein de sentiments inavoués.
Il n'est pas simple de dire vrai.
Le plaisir du jeu, et de l'écriture, c'est de pouvoir envisager tous les possibles. Tenter, oser, essayer, échouer, retenter, avouer. Vivre au sens fort, en fin de compte. Sans avoir peur d'un game over dévastateur. Sans craindre quoi que ce soit. Ne redouter aucun jugement, aucune conséquence.
"L'essentiel est sans cesse menacé par l'insignifiant", écrivait René Char.
Ce soir, je suis d'accord avec lui.
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