C'est désormais un droit bien concret. Depuis le 29 mai, tout internaute européen peut demander à Google de supprimer des liens vers des pages qu'il juge "hors de propos, obsolètes ou inappropriés". L'arrêt du 13 mai de la Cour de justice européenne trouve donc une application directe. Le droit à l'oubli existe bel et bien.
Quand on parle de "droit à l'oubli", on pense à cette possibilité offerte à n'importe quel utilisateur d'effacer ce qui le concerne, sur Internet. Autrement dit, c'est une façon de retirer de la Toile la part de ses données personnelles qui s'y trouve prisonnière, et comme emmêlée. À partir du moment où l'on sait que le nombre de personnes qui se connectent au moins une fois par semaine est passée de 60 à 72 % depuis 2010 (et que seuls 20 % des Européens n'ont jamais utilisé Internet, soit un tiers de moins qu'il y a quatre ans), on mesure l'enjeu. On mesure le progrès.
Le droit à l'oubli amoureux
Mais le droit à l'oubli est une chose. Reste à traiter un autre point, que je n'ai encore jamais vraiment vu abordé : le droit d'oublier l'autre. Je me souviens en effet d'avoir lu La Mare Au Diable, de George Sand, il y a quelques années. Le personnage principal, Germain, est un veuf de 28 ans qui ne parvient pas à se remarier, car ses pensées sont encore tournées vers sa défunte épouse.
Je ne tiens pas à vous spoiler toute l'histoire, mais il se trouve que ce cher Germain rencontre une jeune bergère, Marie, et que cette dernière l'aide malgré tout à surmonter son chagrin. C'est une histoire somme toute assez classique, pour quiconque a un peu vécu. Il est rare en effet que l'on aime une seule personne toute sa vie.
Vie passée, vie en ligne
Mon point est le suivant : ce roman a été écrit en 1846. Qu'en serait-il, aujourd'hui ? Comment Germain aurait-il tourné la page aussi vite, s'il avait partagé le tiers des amis de son ex, sur Facebook ; si la quasi-totalité de ses albums contenaient des photos de son couple passé (idem sur Instagram) ? S'il avait eu autant de souvenirs numériques, images, vidéos, textos, mails, etc. Un épisode de l'excellente série Black Mirror effleure également le sujet.
Sur l'application Secret, je tombe sur des dizaines de messages où les internautes expriment leur difficulté à oublier leur ex. Avec des dizaines de commentaires de compassion, également. Il faut du temps, toujours, en amour. Et on finit par oublier. Il suffit d'écouter Ferré pour s'en convaincre. "Avec le temps, va, tout s'en va. On oublie le visage, et l'on oublie la voix. (…) Et l'on se sent blanchi comme un cheval fourbu. Et l'on se sent glacé dans un lit de hasard. Et l'on se sent tout seul, peut-être, mais peinard. Et l'on se sent floué par les années perdues. Alors, vraiment… Avec le temps… on n'aime plus".
Sur l'application Secret, je tombe sur des dizaines de messages où les internautes expriment leur difficulté à oublier leur ex. Avec des dizaines de commentaires de compassion, également. Il faut du temps, toujours, en amour. Et on finit par oublier. Il suffit d'écouter Ferré pour s'en convaincre. "Avec le temps, va, tout s'en va. On oublie le visage, et l'on oublie la voix. (…) Et l'on se sent blanchi comme un cheval fourbu. Et l'on se sent glacé dans un lit de hasard. Et l'on se sent tout seul, peut-être, mais peinard. Et l'on se sent floué par les années perdues. Alors, vraiment… Avec le temps… on n'aime plus".
Malgré tout, je pense que c'était plus simple avant. Avant que l'oubli ne devienne un sujet si compliqué, à cause d'Internet, et de tout ce qui s'ensuivit. Combien, parmi ces gens-là, sont encore ensemble aujourd'hui ? Il faudrait pouvoir oublier plus sereinement, même si je n'ai pas, à l'heure actuelle, de vraies solutions à proposer. Ni de directive européenne à exiger. Je n'avais qu'un billet de blog à écrire, sur ce sujet. :)
"Sometimes I wish I thought you were dead, so I could stop losing you."
RépondreSupprimer