Si tout se passe bien, il faut s'en rendre compte. Il n'est pas facile d'avoir conscience de son bonheur, encore moins de sa chance. On mesure beaucoup plus aisément son infortune. Pourtant, c'est précisément quand la vie vous accorde son plus beau sourire qu'il faut le lui rendre. “On reconnaît le bonheur, paraît-il, au bruit qu'il fait quand il s'en va”. Souvent, c'est trop tard. Il ne vous reste alors que le regret, l'amertume, la nostalgie.
La chance doit se vivre éveillé. Le destin est railleur, et si vous profitez aujourd'hui d'un vent favorable, gardez à l'esprit qu'un vent contraire peut se lever à tout moment. L'idée n'est pas de ternir le moment profitable, bien entendu, mais d'en comprendre le caractère éphémère pour en profiter d'autant plus.
“Pendant la faveur de la fortune,
il faut se préparer à la défaveur”.
Montaigne
Si la vie nous apprend bien une chose, je crois, c'est ceci. La roue tourne, la chance est rarement perpétuelle. Il y a des bad beats, des contrecoups, des surprises. Benoit Poelvoorde cite dans une interview José Garcia à ce sujet : “sois gentil avec les gens quand tu montes l'escalier, parce que tu les recroiseras en descendant”.
Bien sûr, le pendant de tout cela est pour le moins rassurant : si la chance tourne, elle rattrape aussi le désespéré. Les bonnes choses ont une fin, certes ; mais les mauvaises également. Le temps, en passant, offre de nouvelles possibilités à tout un chacun. Il efface les remords, cicatrise les plaies, rebat les cartes.
Les jeux ne sont jamais faits. Il est toujours temps de se refaire.
Et si tout va pour le mieux, donc, si la chance vous sourit, ne soyez pas inquiets, mais prenez conscience de votre fortune.
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