Dimanche dernier, une femme que je ne connais pas a voulu traverser trop rapidement une avenue parisienne pour prendre son bus qui arrivait. Elle se précipita, et fut heurtée par une voiture qui arrivait dans l'autre sens. Il y eut le bruit du pare-choc, son corps fut projeté sur la chaussée. Il y eut les cris des passants, l'agitation, l'inquiétude dans les regards. Je vis cette femme sur le sol, le sang sur le bitume, la foule autour d'elle. J'appelais les secours au téléphone, qui étaient déjà en chemin, prévenus par le chauffeur du bus.
Et je me retrouvais là, comme tous ces autres, à contempler ce spectacle qui n'en était pas un. À voir cette femme que je ne connaissais pas, inconsciente, sur le boulevard, pour avoir voulu, inconsciente, traverser ce même boulevard, précipitamment.
Pour gagner peut-être cinq ou six minutes dans sa vie, elle venait de la mettre en péril. Ce que ces accidents peuvent sembler stupides, après coup ! Risquer sa peau pour être plus vite chez soi, un dimanche après-midi. Ça ne rime à rien.
Au bout d'un instant, elle se mit à bouger un peu. Au moment du choc, la voiture ne roulait pas trop vite, heureusement, et les secours n'allaient pas tarder. Elle s'en sortirait. Parmi les passants, une femme d'une cinquantaine d'années, devait être médecin. Elle l'avait mis en “position latérale de sécurité”, l'avait tenue par la main, lui avait parlé doucement.
J'ai continué mon chemin, plutôt rassuré.
Accidents de parcours
Accidents de parcours
Mais tout ça m'a ramené à ce triste beau jour de septembre. Un jour comme un autre, où j'allais le cœur léger au travail, marchant dans la rue, sous un grand ciel bleu, et où j'ai découvert qu'une personne était passée sous un bus, cinq minutes plus tôt, boulevard Saint-Michel.
Je repensais à tout ça, hier, en rentrant chez moi.
Je repensais à tout ça, hier, en rentrant chez moi.
Et je pensais aussi au livre d'Éric Fottorino que j'avais acheté la veille. Livre intitulé : “Suite à un accident grave de voyageur”, et dont voici la quatrième de couverture :
“En septembre 2012, à quelques jours de distance, trois personnes se sont jetées sur les voies du RER, derrière chez moi, dans les Yvelines. Un vieillard, une mère de famille, un homme qui n'a pu être identifié. À la violence de leur mort a répondu le silence. Il ne s'est rien passé. Nul n'a désigné la souffrance par un nom. Une voix neutre a seulement résonné dans les haut-parleurs de la gare : “Suite à un accident grave de voyageur”. Nos vie ont pris un peu de retard. À cause de trois détresses qui n'ont jamais existé”.
Tout ça me tourmente un peu. À force de regarder les gens dans les transports en commun, ou dans la rue, je finis par les apprécier, ces voisins quotidiens, ces inconnus familiers. Par ailleurs, c'est très étrange d'assister à un accident grave, comme ça.
Et là, c'est le drame
On se retrouve témoin d'une scène qui devient immédiatement fondamentale pour cet individu que l'on ne connaît pas : le hasard nous donne à voir un instant de vie dont la personne se souviendra tout au long de son existence, probablement.
Nous, on est juste là, à ce moment précis, c'est tout.
J'ai fait un tour sur Internet, pour en savoir un peu plus sur les statistiques des accidents parisiens. Une façon d'approfondir le sujet de ces drames survenus au coin de ma rue. Les chiffres (en baisse depuis 2006) sont plutôt rassurants.
18 piétons sont morts en 2012, quand même. 18 personnes qui allaient au travail, ou qui en revenaient ; ou peut-être se rendaient-elles à un rendez-vous amoureux ; ou bien allaient-elles acheter du pain, pour le dîner ; à moins qu'elles cherchassent bêtement à rattraper leur bus, qui arrivait…
Vivre ensemble
Ce qui est terrible - et qu'Éric Fottorino décrit bien dans son ouvrage - c'est qu'il n'y a pas vraiment de solution à ce problème. La seule piste possible, sur laquelle il revient plusieurs fois, c'est l'attention que l'on peut se porter les uns aux autres : ne plus traverser la ville dans sa bulle, les yeux rivés sur son smartphone. Se soucier un peu des autres, aussi. Ne plus traverser la rue n'importe comment, devant une école, au risque de voir un enfant vous emboiter le pas. S'intéresser un peu à ces gens qui sont là, tous les jours, autour de vous. Qui ont parfois besoin d'un simple regard, pour aller mieux.
Même si, bien sûr, il y aura toujours des accidents.
Accorder un peu d'attention aux autres, à ce qui arrive près de chez soi, presque sous notre nez.
Et là, c'est le drame
On se retrouve témoin d'une scène qui devient immédiatement fondamentale pour cet individu que l'on ne connaît pas : le hasard nous donne à voir un instant de vie dont la personne se souviendra tout au long de son existence, probablement.
Nous, on est juste là, à ce moment précis, c'est tout.
J'ai fait un tour sur Internet, pour en savoir un peu plus sur les statistiques des accidents parisiens. Une façon d'approfondir le sujet de ces drames survenus au coin de ma rue. Les chiffres (en baisse depuis 2006) sont plutôt rassurants.
18 piétons sont morts en 2012, quand même. 18 personnes qui allaient au travail, ou qui en revenaient ; ou peut-être se rendaient-elles à un rendez-vous amoureux ; ou bien allaient-elles acheter du pain, pour le dîner ; à moins qu'elles cherchassent bêtement à rattraper leur bus, qui arrivait…
Vivre ensemble
Ce qui est terrible - et qu'Éric Fottorino décrit bien dans son ouvrage - c'est qu'il n'y a pas vraiment de solution à ce problème. La seule piste possible, sur laquelle il revient plusieurs fois, c'est l'attention que l'on peut se porter les uns aux autres : ne plus traverser la ville dans sa bulle, les yeux rivés sur son smartphone. Se soucier un peu des autres, aussi. Ne plus traverser la rue n'importe comment, devant une école, au risque de voir un enfant vous emboiter le pas. S'intéresser un peu à ces gens qui sont là, tous les jours, autour de vous. Qui ont parfois besoin d'un simple regard, pour aller mieux.
Même si, bien sûr, il y aura toujours des accidents.
Accorder un peu d'attention aux autres, à ce qui arrive près de chez soi, presque sous notre nez.
Ton article m'a émue.
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