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Créer ses propres motifs

Ceux qui affirment avec fierté : “je ne dois mon succès qu'à moi-même, j'ai du mérite, j'ai fait les bons choix, j'ai eu de la volonté au cours de ma vie”, se méprennent sans doute. Si l'on considère que tout ce qui se passe dépend nécessairement d'une cause déterminante, et que cette dernière est à son tour dépendante d'une autre cause tout aussi déterminante ; si l'on prend conscience que tout, dans la vie, est une question de coïncidences, d'intersections, de correspondances, alors on est amené à réfléchir à deux fois avant de s'enorgueillir d'un succès.

Cela étant, dès lors que je comprends une fois pour toutes que ma volonté n'est pas libre absolument, mais provient bien de quelque chose, dès lors que je mesure que toute chose naît d'une graine semée précédemment, je peux décider de devenir moi-même le semeur de mes espérances.

Provoquer l'intersection

Sans orgueil, sans illusion, je peux chercher dans le présent à construire les chemins qui me mèneront à l'intersection souhaitée. Si toute la vie est déterminée par une multitude de motifs, il est de ma responsabilité d'en générer moi-même, pour ma vie future. 


C'est la raison pour laquelle il faut lire, voyager, réfléchir, rêver, se promener, poser des questions, s'intéresser aux choses et aux gens, avoir un idéal. Qu'importe si cela prend du temps ! Ce que l'on sème aujourd'hui peut porter ses fruits plus tard. L'essentiel est de semer.

Voilà que j'ai touché l'automne des idées,
Et qu'il faut employer la pelle et les râteaux
Pour rassembler à neuf les terres inondées,
Où l'eau creuse des trous grands comme des tombeaux.

Et qui sait si les fleurs nouvelles que je rêve
Trouveront dans ce sol, lavé comme une grève
Le mystique aliment qui ferait leur vigueur.”

Il faut lire et relire Baudelaire. Et Edmond Rostand également, cela va sans dire : “N'écrire jamais rien qui de soi ne sortît, et modeste d'ailleurs, se dire : mon petit, sois satisfait des fleurs, des fruits, même des feuilles, si c'est dans ton jardin à toi que tu les cueilles !”. 


Cultiver son jardin, en somme, tout en sachant très bien que ce que l'on fait ne dépend pas que de nous, mais d'une succession de coïncidences, et que ce que l'on récoltera en dépendra tout autant.

Si tu veux que les choses changent, change-les !

Il faut savoir générer ses propres motifs. Repartir sur de nouvelles bases. Se fixer des objectifs. Se projeter, puisque l'intelligence humaine le permet. Réinventer l'avenir, d'une certaine façon. 
En effet, il ne faut pas se tromper : l'idée n'est pas de croire à je-ne-sais-quel destin, comme si tout était écrit à l'avance. Il s'agit simplement de prendre conscience que rien n'arrive miraculeusement, ni par sa propre volonté. 

D'ailleurs, la volonté elle-même, en tant que qualité humaine, se forge nécessairement avec le temps, le caractère individuel, les rencontres, les hasards de l'existence, les réussites et les échecs. Néanmoins, avec celle qui est la vôtre, à l'instant où vous lisez ces lignes, considérez tout ceci comme une raison suffisante de réfléchir à ce que vous aimeriez changer, à ce que vous aimeriez faire, vous.

Si ce billet pouvait être la goutte d'eau nécessaire, le dernier motif suffisant pour vous amener à rebattre les cartes, alors cela serait une excellente chose.


Commentaires

  1. Bravo !
    Enfin écrire tout ça et travailler chez BNP Paribas ...

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  2. Ce n'est pas particulièrement contradictoire… ^^

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  3. Effectivement, un banquier - comme tout un chacun - se doit de repartir sur de nouvelles bases et de réinventer l'avenir, surtout aujourd'hui...

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  4. Mettre dans la même phrase causalité déterministe et "coïncidence" puisque la liberté n'est pas l'inverse du déterminisme, mais plutôt celle du hasard, est par contre contradictoire.
    Connais-tu Pierre Bourdieu ? Je t'en conseille grandement la lecture, il pourra t'être très éclairant sur ces questions épineuses.

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  5. La difficulte' c'est de se regarder a' l'interieur,apprendre a' se connaitre et, par consequence,devenir capable d'engendrer ces propres 'motifs' dans le marasme de la vie contemporaine

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  6. Ton texte est sympathique, mais je me demandais en quoi Rimbaud a été moderne dans sa vie ?
    Passe 20 ans et le déchirement de son amour impossible avec Verlaine, il ne creee plus. Il renie ses maîtres et fuit en voyages. A 20 ans il comprit que la poésie seule ne suffisait pas. Il pensait que la liberté et l'amour etaient necessaires. Mais dans ses explorations, il n'evolue pas vraiment. Il transporte plutôt sa misère d'ame avec quelques gains pécunies pour se consoler. Ça devient de l'agitation et non plus une véritable exploration a mon sens. Il consumme finalement son existence a essayer de faire fortune dans le commerce et le désert. Au point de faire du trafic d'armes. Il revient finalement chez sa mère pour agoniser sans avoir jamais dépasser son désespoir de ses 20 ans.

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  7. Sinon j'ai l'impression que dans ton texte, il y a confusion sur le role et le pouvoir de differentes facultés humaines.
    Rien n'est réalisé dans le succes ou l'echec sans la volonté absolue qui est infinie chez l'homme. En effet, l'homme a la faculte de se choisir un horizon idealiste et pas seulement des objectifs individualistes a courte vue rationnelle. Par contre, comme les humains ne sont pas des dieux, leur volonté ne peut pas être faite instantanément ni etre assuree. Puisque les facultes de puissance et d'entendement sont limitées. Néanmoins il y a des degrés de maîtrise qui peuvent être atteint par ces deux facultes afin de tendre vers le but choisi. Et il en faudra pour faire face à l'adversité, les épreuves, les renards flatteurs, les rapaces voraces ou toute "cause déterminante" et nécessites qui pèsent sur nos corps pensant. Néanmoins, ces facultés seront toujours limités, donc les risques et l'échec sont à accepter comme le succès. Mais en aucun cas une volonté vraie se victimisera : pas de fatalisme, justifications par la chance ou une quelconque complexité de l'obstacle ou de la situation. Quelque soit la faiblesse d'ame des individus qu'il croisera, leur volonte ne dépend pas de lui, ses actions si. Car la liberté est bien la conscience des actions dont nous sommes la cause. Et les solutions pour un être un peu plus libre, absolument, existent bien.
    Car toutes ces causes hors de notre volonte ne sont déterminantes que si tu les laisses te dominer. La justification de cette faiblesse est souvent un "on y peut rien, c'est la vie, la génétique, c les mecs, c les nanas, c complique" etc. Il n'est pas question d'eradiquer ces causes mais de les maîtriser et les dépasser. Cela nécessite en effet pas seulement une force d'âme cherchant à s'elever, mais une patience et un égo maitrise. Un equilibre de tous les instants par le corps et l'esprit, dans la fuite et l'exploration du voyage, la loi qu'on se donne, l'amour , le stoïcisme, la connaissance agissante (pas l'intellectualisme), la création.

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  8. Mais en réalité, beaucoup d'individus restent des gamins capricieux et narcissiques en manque d'attention et de toute puissance. Ils peuvent partager des moments, mais c superficiel, interchangeable. Ils voient in fine les gens, les objets comme des jouets. Ils se divertissent et comprennent la mécanique qui permet de posseder ou d'etre possede. Et ils se lassent vite, comme des gamins avec des jouets que le desir mimetique anime. D'autant plus si le jouet manque à sa collection.
    Mais en toute situation le passé et les causes déterminantes ne sont rien d'autres que des obstacles. Si la volonté propre de l'individu décide vraiment en l'instant présent de les depasser avec les gamineries, le passe et et les causes déterminante devront livrer bataille et donc risques d'etre vaincus. Alors seulement il y a les conditions de possibilités de créer réellement un motif. Et non pas de bégayer dans l'écho de tous les égos angoisses. Angoisses par la solitude, l'echec et le jugement des autres. Au point ou ils vont au mieux créer des copies de motifs et chercher la flatterie. La flatterie sera un baume pour des ego blesses quitte a se laisser posseder, parfois avec fausse naivete. Restera à se divertir et s'étourdir pour obtenir l'effet narcotique. Et ils se consumeront si ils ne s'elevent pas. Car les ego dominant tournent en rond jusqu'à la nausée, changeant au mieux, décors et noms et au pire accumulant en vain de tout bonheur.
    Donc beaucoup de bruits et d'agitations à balayer avec patience pour dépasser les causes determinantes et créer réellement dans l'esprit et l'action, que ce soit par la lecture, le voyage, le questionnement, un idéal etc

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