Ces derniers temps, j'ai rencontré de nombreuses personnes. Si je me contente du milieu professionnel, par exemple, j'en compte déjà plusieurs dizaines. Plusieurs dizaines d'individus, plusieurs dizaines de consciences, plusieurs dizaines de visages ; autant d'histoires, autant d'existences, autant de parcours singuliers. Bien sûr, certaines de ces rencontres sont demeurées quelque peu superficielles : je ne pourrais pas dire que je connais toutes ces personnes. À défaut, pour l'instant, je les reconnais. Et c'est déjà beaucoup.
Je devine certains aspects de leur vie présente ou passée, je découvre certains détails de leur intimité, j'imagine certaines de leurs pensées, en scrutant parfois leur réaction, leur regard, leur manière de parler. Il est toujours intéressant d'observer ses semblables. Il va de soi que je me trompe sur eux, la plupart du temps. Comme eux se trompent sur moi. Comme chacun se trompe sur l'autre.
[Note à moi-même : je découvre, en cherchant un synonyme d'existence, le mot de cénesthésie].
Dans la Toile de mon réseau
Sur Internet aussi on se trouve nez-à-nez avec d'autres consciences. Des consciences qui s'expriment sur des Pages Facebook, qui s'exhibent en quelques photographies, en quelques mots (en cent-quarante caractères parfois), en quelques appétences, quelques “likes” sans lendemain. D'autres personnes qui communiquent, elles-aussi, qui capturent des moments de leur vie pour les partager ensuite, elles aussi. Souvent, une familiarité se crée sans aucune rencontre réelle.
Comme les passants - ou les passantes - qu'on croise dans l'allée du jardin du Luxembourg, comme ceux qu'on voit lire au soleil, comme ces compagnons - ou compagnes - de voyage, “qu'on est seul, peut-être, à comprendre, et qu'on laisse pourtant descendre sans avoir effleuré [la] main”. Comme cette foule incessante d'individus vivant comme nous, nous entourant, nous précédant et nous succédant, allant dans les mêmes boutiques, les mêmes cafés, les mêmes cinémas.
Par hasard
Tous ces autres, récemment rencontrés.
Je ne sais pas ce que j'attends d'eux, ni même si j'attends quelque chose.
“Et que voulais-tu donc ? - Voilà ce que le monde
Au bout de trois cents ans demande encor tout bas.
Le sphinx aux yeux perçants attend qu'on lui réponde.
Ils savent compter l'heure, et que leur terre est ronde,
Ils marchent dans leur ciel sur le bout d'un compas,
Mais ce que tu voulais, ils ne le savent pas”.
Qu'importe. L'essentiel n'est pas là. Ce qu'il faut retenir, c'est qu'il n'est rien de plus important que ces rencontres. La rencontre est ce qui inspire la plupart des romans, la plupart des histoires, la plupart des films. Il suffit de se rendre au cinéma pour s'en rendre compte. Sans évoquer Les Intouchables, c'est surtout deux bandes-annonces qui m'ont inspiré ce billet. Deux bandes annonces qui passent en ce moment, et qui mettent toutes-deux en avant le thème de la rencontre : La Clé des Champs et le dernier Miyazaki, La colline aux coquelicots. Avec à chaque fois un point crucial, le ciment de toute rencontre : la magie du hasard.
Une rencontre. C'est de là que tout découle, de toute façon, on le sait, depuis le premier instant.
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