Accéder au contenu principal

Le balayage des jours

Le balayage des jours. Un événement en chasse un autre. Dimanche dernier, mes voisins étaient souriants, dans la rue, klaxonnant, riant, s'applaudissant. Nous étions champions du monde et les scooters filaient sans casque sur les boulevards heureux. Plus d'embrassades aujourd'hui. Les inconnus le sont redevenus. On se croise, on s'adresse un salut simple, courtois, dans l'ascenseur. On s'ignore sur les boulevards communs.

C'est la loi naturelle. L'ordre des choses.

L'actualité en est l'incarnation-même. Chaque nouvelle vient effacer celle de la veille. Rien n'est plus vieux que le journal déjà lu, qui git dans le sac poubelle de la station de métro traversée par les bourrasques du matin. Quel que soit l'événement, il ne dure jamais très longtemps. Aucun drame ne s'éternise jamais, à cette échelle-là.

So what?

Dans nos vies personnelles, c'est un peu différent. Il y a des souvenirs qui restent, des jours qui changent tout, soudainement, et à jamais. Même si, dans notre quotidien, ça reste assez similaire, quand on y pense. Un mauvais jour finit toujours par s'achever. La nuit vient tout recouvrir, et le temps fait son office. On oublie. On avance. Et ce qui nous rendait triste est bientôt effacé.

La seule question qui vaille, donc, si l'on s'arrête une seconde, un soir d'été, est la suivante : que restera-t-il, à la fin des fins ? Puisque le temps défile et que chaque peine et suivie par une joie, elle-même remplacée par un sentiment différent encore ; puisque rien n'arrête cette course effrénée vers l'alcôve obscure dont parle Baudelaire ; puisqu'en fin de compte, il en restera si peu, de tout cela : il faut vivre, vivre et vivre encore. Penser à l'essentiel, à ce qui importe, à ce qui marque, à ce qui reste. 

Et agir en fonction. Faire, construire, imaginer, écrire, rêver, partager, sortir, rire, embrasser, vouloir. Tout est autrement superflu. Il faut œuvrer. Trouver ce qui nous anime, ce qu'on aime faire par-dessus tout, et s'y atteler. Son domaine de prédilection. Ce qui nous fait kiffer. Car c'est là qu'on sera bon, qu'on sera performant, qu'on sera admirable, même, qui sait ?

Au crépuscule, il ne restera que ce qu'on aura fait, ou que ce qu'on aura vécu. Tout le reste aura déjà disparu depuis longtemps. Balayé par les jours, comme le vent balaye les feuilles mortes.

Commentaires

  1. Joyeux universaire.. ! Avec 1 jour de retard ou 364 jours d'avance. Tout est relatif. Le temps surement. Je souhaite que de belles révolutions te mène à une destinée flamboyante, je t'adresse mes baisers-souvenirs et mon clin d'œil éternel. Il y aura toujours un quart d'heure de songe dans ta direction, basileus gratias.

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Derrière les mots et les images des médias sociaux

J amais il n'y avait eu de si longues périodes de silence sur mon blog. Aucun post depuis février. Je crois que j'avais besoin de prendre un peu de recul. De m'interroger aussi sur ma présence en ligne. Allez savoir si c'est l'âge - le mien, d'ailleurs, ou celui d'Internet - ou autre chose encore : mais on finit par se poser des questions sur ces mots qu'on donne à lire. C'est sans doute à force de consulter les plateformes sociales. Toutes ces images, ces vidéos, ces sourires affichés, qu'on voit quotidiennement. En sachant aussi ce qu'ils cachent. C'est notre époque : nous possédons des outils de plus en plus performants pour communiquer, mais ce que nous communiquons est souvent loin de ce qui nous anime véritablement. Souvent loin de ce que nous sommes. En résulte sans doute parfois un certain mal-être, qui est compensé par ces mêmes outils numériques nous offrant des solutions de méditation ou des cures de sommeil. C'est la montr

Puisqu'il faut vivre avec

J e ne sais même pas par où il faudrait commencer. Ce n'est finalement pas simple d'écrire face à une situation inédite, imprévisible, surprenante, historique. J'ai plutôt l'habitude de décrire ici de petits aspects du quotidien, de partager des réflexions personnelles, sans grande prétention. Soudain, le monde s'écroule. Tenir un blog en pleine crise sanitaire mondiale apparaît quelque peu illusoire.  J'écrivais pourtant, sur ce même blog, il y a plusieurs années maintenant, ce sentiment de vivre depuis ma naissance le temps des crises perpétuelles . J'entendais parler depuis toujours - du moins était-ce mon sentiment - de crise. Crise de l'éducation nationale, crise du travail, crise identitaire, crise de l'hôpital, crise écologique bien sûr, crise migratoire, crise économique, j'en passe et des meilleurs. La crise était devenue la norme. Et c'est de nouveau le cas, il me semble. Nous vivons l'époque d'une crise continue.

Pourquoi j'aime la Poésie

J e ne saurais expliquer comment m'est venue l'envie d'apprendre par cœur des poèmes, quand j'avais une dizaine d'années. Bien sûr, il y avait des livres chez moi. Des bibliothèques qui accordaient une place non négligeable à la poésie. Bien sûr, j'aimais ces recueils, qui s'ouvraient d'eux-mêmes aux pages les plus précieuses, offrant ces mots qui disaient tout  en disant  peu . " Il faut peu de mots pour dire l'essentiel ". Bien sûr, j'avais la chance d'avoir, à portée de la main, Aragon, Baudelaire, Éluard, Reverdy ou Rimbaud. Et puis, il y avait mon arrière-grand-père, cet héritage culturel transmis dès le plus jeune âge. Ce Victor Segalen dont je pouvais parcourir les ouvrages originaux. Pour sentir ce papier proche d'un papyrus, soigneusement plié entre deux plaques de bois fines que tenait jointes un ruban. Ça aide, d'avoir ainsi dès l'enfance une admiration pour l'écriture. Et une raison supplémentaire