Il y a la ville vue de loin, les lumières du soir qui tombe, les passants insignifiants qu'on croise, en flux, en masses, en grappes agglutinées, ceux qu'on ne prend pas le temps de regarder. Il y a cette globalité assez effrayante, finalement, dans une ville aussi peuplée que Paris : ces métros bondés, ces magasins remplis, ces restaurants bruyants…
Vivre en ville, c'est accepter la proximité des autres, nécessairement. Ces chers voisins qui sont si nombreux, autour de nous. Et en disant cela, j'ai la phrase de Desproges en tête : "le voisin est un animal nuisible assez proche de l'homme".
Ce qui est néanmoins toujours plaisant, je trouve - et ce, quelle que soit la ville -, c'est quand le hasard nous amène à découvrir une personne dans son individualité, dans sa singularité. La fenêtre d'en face, où la voisine fume une légère cigarette, quand la soirée s'achève… Le voisin du dessous, dont on ne voit que les mains, quand il allume le feu sous la casserole, dans sa cuisine, en préparant son dîner… Ces simples moments de vie, si nombreux, autour de nous. Ces existences entremêlées.
Sur les médias sociaux, c'est un peu la même chose. Nous sommes tous au même endroit, réunis un instant pour partager des choses. On se croise, on s'ignore, on se bouscule. On ne sait pas toujours ce que l'on cherche, précisément. Et parfois, on tombe sur une personne qu'on apprend à connaître un peu plus. Ou dont on découvre un aspect.
Il y a une quinzaine de jours, je rentrais du ski, et je me suis retrouvé dans les embouteillages. Genre vraiment. Comme jamais, en fait. Soudain, la neige est tombée abondamment, et les autorités ont décidé de fermer l'autoroute. Près de six heures durant, je me suis ainsi retrouvé au milieu de centaines d'autres voitures immobilisées.
Mais ce n'était plus des voitures, anodines et anonymes. C'étaient des gens, qui, très vite, sont sortis pour prendre l'air, faire pipi, s'occuper de leurs enfants, construire un bonhomme de neige… Nous étions tous, bloqués au même endroit, dans la même galère des retours de vacances. Mais personne ne râlait vraiment. Et c'était comme la première fois que ces individus se découvraient.
Bon, c'était quand même pas le meilleur moment de mon existence, vous vous en doutez. Mais ça m'a fait du bien, je crois, de voir tous ces autres. Ces inconnus qui n'en étaient plus. Ou qui l'étaient un peu moins. Des inconnus devenus familiers, en quelque sorte.
© illustration : Inside Views Photography.
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