L'herbe est molle et profonde
Sous les branches qui pendent,
Lourdes de fruits et de fleurs blanches ;
Lourde est la senteur enivrante,
Et douce est l'ombre. On s'y étend ;
Un sourd sommeil coule dans le sang.
Et les branches s'abaissent et se penchent,
Et vous caressent de longs frôlements,
Vous caressent et vous soulèvent
De la terre doucement ;
Et l'arbre vous prend dans ses bras puissants,
L'arbre joyeux et frémissant
Qui resplendit dans la lumière.
Il vous enlace et vous berce dans l'air,
Et l'on est lui, l'on est sa sève,
Sa force féconde, et l'on frémit
En ses naissantes fleurs, et ses fruits,
En ses milliers de feuilles légères ;
On respire en son souffle, on embaume la terre.
Et l'on s'éveille comme un fruit qui tombe,
Un fruit lourd et vermeil,
Dans l'herbe profonde,
À travers le soleil.
Charles Van Lerberghe
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