La campagne électorale, longue, âpre, éprouvante, s'achève. Calme plat. Calme républicain. Le protocole se charge de rassembler un peuple, de faciliter la transition. La mémoire commune nous réunit : peu importe le parti, l'opinion, quand nous songeons à celles et ceux qui sont morts pendant les grandes guerres du siècle précédent. La politique s'incline toujours face à l'Histoire.
Dans quelques jours, une nouvelle ère va s'ouvrir. L'alternance. Comme une respiration démocratique. Tout ce processus - la campagne, les débats, l'élection, les cérémonies - me font prendre conscience que la France est aussi une machine, avec ses rouages. Un corps, dont les institutions sont autant d'organes vitaux.
Président de son propre corps électoral
Le rythme des élections change simplement la donne. Le corps humain n'a pas besoin de se réorganiser tous les cinq ans. Ce serait étrange de s'appliquer à soi ce que l'on applique au pays. Je veux dire par là de se remettre en question tous les cinq ans, de reconsidérer ses choix propres, ses convictions profondes, de s'interroger sur le chemin que l'on a commencé à emprunter.
Peut-être que j'ai moi aussi une majorité silencieuse en mon for intérieur. Des pensées que je ne soupçonne pas. Un inconscient qui aimerait que je lui propose quelque référendum. Pendant quelques mois, je pourrais entrer en campagne avec moi-même, comme un joueur d'échecs expérimenté qui joue ses propres coups et ceux de son adversaire, simultanément.
Bilan d'un quinquennat existentiel
Je pourrais faire mon bilan. Regarder avec minutie ce qui a été fait. Me reprocher certains actes, certains choix. Mesurer les conséquences de telle ou telle initiative malheureuse. Tout en reconnaissant bien sûr les avancées, les réussites. Sans me congratuler, je pourrais me comparer à d'autres. Je pourrais fictivement me choisir un modèle allemand : un autre moi-même, en quelque sorte, un idéal vers lequel je pourrais tendre.
Qu'ai-je fait concrètement ces cinq dernières années ?
Et si le changement, c'est maintenant, quel serait mon changement, à moi ? Pour reprendre la phrase du film Le cœur des hommes : “qu'est-ce que je ferais si j'étais moins con ?”. Que dois-je corriger chez moi ? Quels sont les principaux défauts que je peux rectifier immédiatement ? Quelles réformes puis-je engager pour ma propre personne ?
D'autant que je suis intimement convaincu que chacun peut changer.
Chacun doit savoir se poser ces questions.
Il nous faut regarder, mais il nous faut aussi dire les choses, faire, agir, et changer. Cela revient d'une certaine façon à se confier un nouveau mandat. À se faire confiance.
En évitant, si possible, la cohabitation.
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