J'ai l'habitude - quand il m'arrive quelque chose - de prendre un livre dans la bibliothèque, de chercher une situation similaire, et de m'inspirer des réactions héroïques du personnage principal pour se tirer de l'embarras. Sans aller jusque là, il est évident qu'on trouve dans certains ouvrages les réponses aux questions qui vous assaillent, et vous tiraillent, parfois.
Du Roman inachevé aux Fragments d'un Discours amoureux, en passant par Les Fêtes Galantes ou Ainsi Parlait Zarathoustra, les livres qui m'ont permis de comprendre l'existence sont nombreux. Plusieurs, sur la table de chevet, près du lit, m'ont remonté le moral à des moments où j'en avais bien besoin.
“Les exemples vivants sont d'un autre pouvoir ; Un Prince, dans un livre, apprend mal son devoir”. Corneille
C'est une chance de vivre après des millénaires de culture, d'échanges, de transmission, de guerre et d'amour. Vivre après tous ces autres, si nombreux, qui ont vécu, aimé, souffert, qui se sont séparés, qui ont lutté, qui sont tombés malades, qui ont regretté, qui ont découvert, qui ont inventé… est un privilège. Ne pas être le premier des hommes. Ni le dernier.
Comment expliquer qu'on souffre encore, d'ailleurs, quand un malheur survient, alors que tous ces autres nous ont maintes fois averti ? N'est-ce pas mystérieux ? (“Moi, j'ai tout donné mes illusions et ma vie et mes hontes pour vous épargner la dérision de n'être au bout du compte que ce qu'à la fin nous aurons été à chérir notre mal le papier jauni des lettres jetées au grenier dans la malle”).
C'est sans doute qu'aucune vie n'est parfaitement semblable à une autre. Et, surtout, qu'on ne peut comprendre l'existence qu'en l'arpentant soi-même.
“La vie est une chose grave. Il faut gravir”. Reverdy
Pour vivre, il faut expérimenter, subir, trébucher, se relever. Échouer, de temps en temps. S'époumoner bien souvent. Souffler enfin. Jouir et rire, courir à perdre haleine. C'est bien différent de tout ce que l'on peut ressentir en lisant un recueil de poèmes, un roman ou un conte.
D'autant que ces derniers manquent souvent de fin. Que deviennent les princesses et les princes dix ans après les histoires qui nous sont racontées ? Comment vieillissent-ils, les uns et les autres ? Comment s'organisent-ils ? Que font-ils de leurs doutes, de leurs peurs, de leurs envies ?
Le mieux est certainement de vivre ET de lire. En lisant, en étant vivant, pour paraphraser Julien Gracq. Prendre la vie au sérieux, puisque c'est “une chose grave”. Et la gravir jour après jour, en mesurant à quel point c'est une chance de pouvoir se livrer à un tel alpinisme existentiel.
Comprendre, enfin, que les livres sont des prises qui aident, simplement, à ne pas perdre l'équilibre afin de poursuivre l'ascension.
Comprendre, enfin, que les livres sont des prises qui aident, simplement, à ne pas perdre l'équilibre afin de poursuivre l'ascension.
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