Accéder au contenu principal

Du bout du sabre

Nous autres, sur nos chevaux, n'entendons rien aux semailles. Mais toute terre labourable au trot, qui se peut courir dans l'herbe,

Nous l'avons courue.

Nous ne daignons point bâtir murailles ni temples, mais toute ville qui se peut brûler avec ses murs et ses temples,

Nous l'avons brûlée.

Nous honorons précieusement nos femmes qui sont toutes d'un très haut rang
Mais les autres qui se peuvent renverser, écarter et prendre,

Nous les avons prises.

Notre sceau est un fer de lance : notre habit de fête une cuirasse où la rosée cristallise : notre soie est tissée de crins. L'autre, plus douce, qui se peut vendre,

Nous l'avons vendue.

o

Sans frontières, parfois sans nom, nous ne régnons pas, nous allons. Mais tout ce que l'on taille et fend, ce que l'on cloue et qu'on divise...
Tout ce qui peut se faire, enfin, du bout du sabre,

Nous l'avons fait.

Victor Segalen, Stèles

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

L'image parle d'elle-même

35 % des Français interrogés par TNS Sofres  (en juin 2012) affirment avoir déjà posté plus de 100 photos en ligne. Un chiffre parmi d'autres, bien sûr, mais qui illustre assez bien notre époque : celle de la prééminence de l'image . La photographie avait déjà une place de choix dans les années 1980 ou 1990, c'est certain, mais elle est devenue une pièce maîtresse de la conversation .  L'image, élément de langage Comme le souligne très justement André Gunthert dans cet article  (que je vous recommande) : “ pour la première fois de son histoire, la photographie traditionnelle est devenue une pratique de niche au sein d'un univers plus vaste, structuré par les mobiles et les réseaux sociaux : l'image communicante ”. Et de rappeler qu'en France, en 2011, il se vendait 4,6 millions d'appareils photographiques (deux fois plus qu'à la fin des années 1990) contre 12 millions de smartphones. Le mobile et les réseaux sociaux sont de fait les...

Remplacer “Week-End” par un mot français

T ous les lundis, on trouve des gens pour se plaindre . Et tous les vendredis, des gens pour se réjouir. C'est devenu habituel, commun, systématique. Des sites ont même été créés dans cet esprit.  http://estcequecestbientotleweekend.fr par exemple. Bien entendu, il y a des exceptions . Il y a des gens qui ne travaillent pas, ou des gens qui travaillent à temps partiel, voire des gens qui travaillent uniquement le week-end. Cela étant, on retrouve quand même ce rythme, éternel.  Ce qui est assez fou, quand on y pense, c'est que depuis le temps, personne n'a été capable en France de trouver un nom pour désigner le week-end . On utilise ce terme 150 fois par an, dans nos conversations, sans chercher à le remplacer par une expression made in France .  Bientôt le SamDim “Fin de semaine”, la traduction littérale de “week-end” désigne finalement le jeudi et le vendredi, dans le langage courant. Il faut donc trouver autre chose :  Je pr...

Savez-vous ce qu'est un kakemphaton ?

C ultivons-nous un peu, si vous le voulez bien. Nous passons nos journées à nous stalker  les uns les autres, à regarder des photos, à suivre l'actualité, à tel point que nous finissons par oublier d'apprendre. C'est important, pourtant, d'apprendre . Savez-vous, par exemple, ce qu'est un kakemphaton ? Je présume que non, en m'excusant par avance auprès de mes lecteurs les plus érudits, qui pouffent et s'exclament en eux-mêmes : "bien sûr, qui donc ignore ce qu'un kakemphaton est ?" avant de délaisser ce blog pour se replonger dans la Critique de la Raison Pratique.  Maladresse littéraire Le kakemphaton est une figure de style. Ce nom vient du grec " kakos " ("mauvais, laid") et " emphaton " ("parole"). Elle désigne "la rencontre de sons d'où résulte - involontairement - un énoncé ridicule, déplaisant, ou - volontairement - tendancieux".  En gros, c'est lorsque de g...