Accéder au contenu principal

Articles

Affichage des articles du mars, 2014

Sérénade printanière

H ier comme aujourd'hui, ce soir comme demain, Je t'adore ! Quand je vois ton regard, quand je frôle ta main, C'est l'aurore ! Qui donc nous avait dit que le monde est méchant, Que l'on souffre, Que la vie est un pont qui tremble, se penchant Sur un gouffre ? Où donc sont les ennuis, les erreurs, les dangers, Les désastres ? Avril gazouille et rit dans les tendres vergers Fleuris d'astres ! Le sombre hiver a fui ; le radieux printemps Nous délivre. Viens mêler à mes pleurs tes baisers haletants ; Je veux vivre ! (…) Et je ne vois plus rien que l'éclair de tes yeux Pleins de fièvres… Viens ! Je veux soupirer les suprêmes aveux Sur tes lèvres !… Augusta Holmès

J'avais vingt ans, depuis dix jours à peine

J 'avais vingt ans, depuis dix jours à peine. C'était en plein été. La chaleur étouffante nous incitait à retourner nous baigner dans la mer, tous les quarts d'heure. J'avais le teint bronzé, le sourire aux lèvres ; des cheveux ébouriffés où se mêlaient le sable et le sel. Quelques jours plus tôt, j'avais gagné une somme rondelette au casino de Barcelone - en pièces de 1 euro, ce qui renforçait mon impression de posséder une petite fortune. Je venais de vivre plusieurs jours d'insouciance, avec mes plus proches amis, des soirées merveilleuses, que je n'oublierai jamais. L'année de khâgne était derrière moi, je pouvais profiter de vacances bien méritées. J'avais vingt ans, depuis dix jours à peine. Six mois plus tôt, la jeune femme dont j'étais éperdument amoureux venait de céder à des semaines de séduction acharnée, pour tomber - enfin - dans mes bras. C'était le début de l'idylle, les premières semaines enflammées, les premiers

Lucky you

S i tout se passe bien, il faut s'en rendre compte. Il n'est pas facile d'avoir conscience de son bonheur, encore moins de sa chance. On mesure beaucoup plus aisément son infortune. Pourtant, c'est précisément quand la vie vous accorde son plus beau sourire qu'il faut le lui rendre. “ On reconnaît le bonheur, paraît-il, au bruit qu'il fait quand il s'en va ”. Souvent, c'est trop tard. Il ne vous reste alors que le regret, l'amertume, la nostalgie. La chance doit se vivre éveillé. Le destin est railleur, et si vous profitez aujourd'hui d'un vent favorable, gardez à l'esprit qu'un vent contraire peut se lever à tout moment. L'idée n'est pas de ternir le moment profitable, bien entendu, mais d'en comprendre le caractère éphémère pour en profiter d'autant plus. “ Pendant la faveur de la fortune,  il faut se préparer à la défaveur ”. Montaigne Si la vie nous apprend bien une chose, je crois, c'est c

Ce que m'a dit la minute

L a minute m'a dit : “Presse-moi dans ta main ; Tu ne sais aujourd'hui si tu seras demain ; Ainsi prends tout le suc qui m'enfle comme une outre, Ne tourne pas la tête et ne passe pas outre, Vis-moi !… dans un instant, je serai du passé ! Mais tu ne sais peut-être au juste ce que c'est Qu'éteindre dans ses bras la minute qui passe, Si tu comprends la splendeur grave de l'espace Qui te laissait jadis indifférent et froid, Si tu sais accepter la douleur sans effroi, Si tu sais jouir d'un très subtil parfum de rose, Si pour toi le couchant est une apothéose, Si tu pleures d'amour, si tu sais voir le beau Alors suis sans trembler la route du tombeau. Tu vivras de chansons, de splendeurs, de murmures, Le chemin n'est plus long si l'on cueille ses mûres, Et je suis près de toi la mûre du chemin !” La minute m'a dit : “Presse-moi dans ta main”.  Jean Cocteau

Un baiser

J e chante un baiser Je chante un baiser osé Sur mes lèvres déposé Par une inconnue que j'ai croisée Je chante un baiser Marchant dans la brume Le cœur démoli par une Sur le chemin des dunes La plage de Malo Bray-Dunes La mer du Nord en hiver Sortait ses éléphants gris vert Des Adamo passaient bien couverts Donnant à la plage son caractère Naïf et sincère Le vent de Belgique Transportait de la musique Des flonflons à la française Des fancy-fair à la fraise Elle s'est avancée Rien n'avait été organisé Autour de moi elle a mis ses bras croisés Et ses yeux se sont fermés  Fermés Jugez ma fortune Sous l'écharpe les boucles brunes C'est vrai qu'en blonde j'ai des lacunes En blonde j'ai des lacunes Oh… le grand air ! Tournez le vent la dune à l'envers Tournez le ciel et tournez la terre Tournez tournez le grand air La Belgique locale Envoyait son ambiance musicale De

Le règne du noir

“ J e prétends donner à ceux qui me liront, force, joie, courage, défiance et perspicacité ”, écrivait André Gide dans son journal, en 1924. Je souhaiterais trouver un blogueur, aujourd'hui, un auteur, un parolier, un musicien - qu'importe ! - qui me donne “ force, joie et courage ”. Ce n'est pas une mince affaire. “ Nous ne rencontrons d'ordinaire, parmi les gens intelligents, que des perdus, et parmi les gens d'action que des sots ”. De nos jours, les gens intelligents sont tout aussi perdus qu'en 1924, et les sots le sont encore davantage. Ce qui plaît à mes contemporains est souvent noir, triste, sombre, douloureux. Le quotidien ennuie, pèse, use, déprime.  Alors on danse . Le présent effraie. On s'identifie aux pires situations. Alors qu'il n'y a ici ni guerre, ni épidémie, ni drame véritable, chacun broie du noir. Chacun toise son semblable. Tous les mêmes . Fort minables . Le nouveau clip à la mode confirme ce que j'avance ici.

Tirer des leçons de l'avenir

R ien n'est plus naturel, quand on se trouve confronté deux fois à la même situation, que de se préparer à ce que les circonstances se reproduisent une troisième, puis une quatrième fois. J'ai été maltraité, je le serai encore. J'ai échoué, j'échouerai encore. J'ai été abandonné, trompé, quitté, dupé, c'est donc que le destin me réserve cette fatalité. Combien de fois  ai-je entendu ce discours ? C'est, à mon sens, une erreur. Il ne faut jamais tirer les conclusions a priori . Ni tracer les traits avant que les points n'existent. Tant que tous les événements n'ont pas eu lieu, les relier les uns aux autres relève de la folie. C'est ce que souligne Steve Jobs dans son célèbre discours de Stanford : “ you can't connect the dots looking forward; you can only connect them looking backwards ”.  Ce n'est pas parce que vous êtes tombé dix fois que vous tomberez une onzième fois. [Lire : l'éternel retour du poisson rouge , à ce

Je disais l'autre jour…

J e disais l'autre jour ma peine et ma tristesse Sur le bord sablonneux d'un ruisseau dont le cours Murmurant s'accordait au langoureux discours Que je faisais assis proche de ma maîtresse. L'occasion lui fit trouver une finesse :  Silvandre, me dit-elle, objet de mes amours, Afin de t'assurer que j'aimerai toujours, Ma main dessus cette eau t'en signe la promesse. Je crus tout aussitôt que ces divins serments, Commençant mon bonheur, finiraient mes tourments, Et qu'enfin je serais le plus heureux des hommes. Mais, ô pauvre innocent, de quoi faisais-je cas ? Étant dessus le sable elle écrivait sur l'onde, Afin que ses serments ne l'obligeassent pas. Pierre de Marbeuf

C'était exactement observé